Nous posons cette question car nous avons eu connaissance à cette rentrée 2022 de plusieurs cas de conflits voire d’éviction brutale de paysans d’un lieu de distribution en AMAP sans concertation. Nous désirons attirer votre attention sur ce point : Une AMAP est-elle une association de consommateurs ?
Au regard de la charte nationale des AMAP(s) une AMAP est une association singulière entre un paysan et un mangeur [1] , matérialisée par un contrat de droit privé passé entre un producteur et un consommateur [2] sur la diversité, la fréquence, la prise en compte des aléas de production mais sans clause de résiliation mais un engagement social [3]
Si le lieu de distribution dit « une AMAP » est public, les municipalités exigent généralement la création d’une association loi 1901 notamment pour que le local soit assuré. Très souvent, dans les statuts de ces associations, seuls les consommateurs sont membres. Mais les statuts de l’association ne doivent-ils pas être à l’image éthique de la charte ? A savoir une « Association collégiale loi 1901 » [4] définissant la relation consommateurs et paysans de cette AMAP.
Ainsi au sein d’un conseil collégial définit en AG la représentation entre consommateurs et paysans-producteurs devient paritaire pour délibérer. Comme, le nombre de consommateurs est toujours supérieur au nombre de paysans-producteurs, le conseil collégial pourrait être composé par exemple d’un collège des référents (ou coordinateurs) et d’un collège des paysans producteurs (une personne représentant une entité juridique agricole). Il reviendrait éventuellement à l’assemblée générale de fixer le montant de la cotisation le cas échéant pour les paysans, membre de droit dans le conseil collégial de l’association.
Ce type de statut protégerait les paysans lors d’un différend entre un paysan-producteur et des consommateurs, un vote à la majorité absolue dans les 2 collèges (paysans et mangeurs) permettrait par exemple de délibérer équitablement (comme l’éviction ou l’arrivée d’un paysan).
Si vous souhaitez conserver les statuts classique de votre association loi 1901, n’oubliez pas de considérer au minimum les paysans comme membre de droit avec ou sans cotisation et de prévoir dans un règlement intérieur voté tous les ans en AG la relation entre paysans et consommateurs.
Ceux qui sont en « association de fait » (distribution sur un lieu privé qui ne nécessite pas la création d’une association loi 1901) peuvent être aussi confrontés à cette situation, plus difficile à gérer car seul le propriétaire du lieu possède en toute légalité l’autorité pour admettre ou pas les personnes de son choix.
A la lecture de l’article Karine LE RUDULIER[5] , Enseignant-chercheur, IGR-IAE de Rennes, Université de Rennes I, qui a étudié les statuts des AMAP, vous pouvez engager une réflexion pour trouver une solution. Elle définit leur cadre juridique d’original, hybride, complexe et façonné par l’autorégulation (titre de l’article).
PS – Vous trouverez ci dessous les statuts type d’une AMAP en « Association collégiale ».
statuts AMAP collégiale
Le changement de statuts se fait par un vote en Assemblée Générale Ordinaire ou Exceptionnelle dans le cadre des statuts existants.
[1] Extrait de la charte des AMAP nationale 2014 : « Concernant les terminologies » :
• est appelé « AMAP », le collectif formé de l’ensemble des amapien-ne-s et paysan-ne-s engagé-e-s dans un partenariat solidaire, local, contractualisé, sans intermédiaire commercial, avec un esprit de pérennité.
• est appelé « amapien-ne », une personne physique bénévole signataire d’un ou plusieurs contrats d’AMAP en cours de validité avec un ou des paysan-ne-s. Le groupe d’amapienne-s, dans une démarche non lucrative, se constitue en association (déclarée ou pas).
• est appelé « paysan-ne en AMAP », un-e paysan-ne signataire de plusieurs contrats d’AMAP en cours de validité avec des amapien-ne-s. »
[2] Extrait de la charte des AMAP nationale 2014 : « Concernant l’engagement » :Amapien-ne-s et paysan-ne-s en AMAP s’engagent mutuellement sans intermédiaire à partager la production pour une période donnée, par le biais de contrats solidaires (la durée de la période de contrat est liée aux cycles de l’activité de la ferme et dépend de chaque famille d’aliments contractualisée).
Ce partenariat favorise la transparence entre amapien-ne-s et paysan-ne-s.
Pour chaque famille d’aliments, le contrat : 3
- stipule les engagements réciproques des deux parties tels que définis dans la charte,
- établit un prix juste et rémunérateur prenant en compte la viabilité économique de la ferme et les conditions sociales de celles et ceux qui y travaillent.
[3] Extrait de la charte des AMAP nationale 2014 : « Concernant l’engagement social »
Pour les paysan-ne-s en AMAP :
- être présent-e-s sur le lieu de livraison (ou occasionnellement représenté-e-s),
- créer et entretenir des liens avec les amapien-ne-s,
- sensibiliser les amapien-ne-s à leur métier et à la vie de la ferme,
- participer à l’organisation de visites de ferme et d’ateliers pédagogiques,
- s’impliquer dans la vie du mouvement des AMAP et de ses partenaires.
Pour les amapien-ne-s :
- s’impliquer dans la vie de l’AMAP (livraison, communication, animation, relation paysan-ne-s, continuité des partenariats, réseau,…),
- respecter les modes de fonctionnement de l’AMAP,
- participer aux visites de ferme et à leur organisation,
- participer à des activités pédagogiques et de soutien aux paysan-ne-s,
- être partie prenante de la vie du mouvement des AMAP et de ses partenaires.
[4] https://www.assistant-juridique.fr/association_collegiale.jsp